De versions en versions, parfois contradictoires sur lâorigine du peuplement de Thionck-Essyl, nous en avons retenu les aspects les plus communĂ©ment admis. Les diffĂ©rentes versions orales recueillies auprĂšs de certains notables lors de nos enquĂȘtes divergent sur plusieurs points. Nous avons procĂ©dĂ© Ă une synthĂšse de lâhistoricitĂ© faisant ressortir les points saillants sur lesquels convergent le plus souvent de nombreux points.
Ainsi au dĂ©part, Ă©tait le royaume de Moff-Ewi qui regrouperait dix villages en un seul bloc. Le peuplement serait sĂ»rement le rĂ©sultat dâune immigration depuis la GuinĂ©e Bissau qui tout dâabord, aurait transitĂ© par Essyl (village de la CommunautĂ© rurale dâEnampor dans lâarrondissement de Nyassia), dans le royaume de Bandial (Sud-Ouest de Ziguinchor), puis a fini par sâĂ©clater en une myriade de bourgs. Cette dislocation Ă©tait essentiellement motivĂ©e par un but : la recherche de terres nouvelles. Il est remontĂ© plus loin dans cette origine, car pour Youssouf ManĂ© dit Manga (68 ans), notable dans le quartier de Batine, tout est venu dâune guerre qui a provoquĂ© un dĂ©part massif de populations diola et bainounk, surtout de lâempire du Gaabou (une grande partie de lâactuelle GuinĂ©e Bissau) oĂč ils cohabitaient avec les mandingues, les ballantes et autres.
Dâautres thĂšses dĂ©veloppĂ©es et soutenues aussi par dâautres personnes ĂągĂ©es comme Cheikh Abba Badji (89 ans), chef de quartier de Batine et Abdoulaye Djiba (89), ancien PrĂ©sident de la CommunautĂ© rurale de Thionck-Essyl de 1980 Ă 1990 et qui approfondissent lâhistoire confirment que la population serait Ă lâorigine de pĂȘcheurs et dâagriculteurs installĂ©s Ă Bourofaye (village Ă moins de 10 km au Sud de Ziguinchor) dâoĂč ils ont quittĂ© pour sâĂ©tablir Ă Essyl-Bandial. De nos jours, certaines familles essyliennes y tiennent de grandes riziĂšres et y vivent. Ainsi, ces populations du Sud de Bandial, du fait des guerres inter villages et de lâinsuffisance dâespaces rizicoles consĂ©cutives Ă la grande pression dĂ©mographique furent obligĂ©es de remonter vers le Nord Ă la recherche de sĂ©curitĂ© et de nouvelles terres de culture. De cette localitĂ© dâEssyl (dans le Bandial), dâautres populations migrĂšrent vers la rive gauche du Fleuve Casamance oĂč ils fondĂšrent un endroit qui est aujourdâhui devenu le village dâAffiniam. Un groupe de pionniers, issu de ces vagues migratoires pousse plus avant sa marche vers le Nord oĂč ils crĂ©Ăšrent le village de Thionck-Essyl qui signifie « sâaccroupir pour cuisiner », et par rĂ©fĂ©rence Ă leur village dâorigine, Essyl. Cette zone se prĂ©sentait comme propice Ă la cueillette dâhuitres (câest ce qui explique aujourdâhui lâomniprĂ©sence des traces de la rĂ©colte des huitres avec des amas coquilliers sur la frange cĂŽtiĂšre de Niaganane jusquâĂ Kamanar en passant par Batine), Ă la chasse mais aussi et surtout, Ă la riziculture et Ă la pĂȘche au harpon.
Cependant, les rĂ©cits sur lâorigine du nom Thionck-Essyl, sa dĂ©couverte, le premier lieu par lequel les ancĂȘtres du village ont dĂ©barquĂ© continuent de faire un dĂ©bat jusquâĂ prĂ©sent, faisant lâobjet de polĂ©mique entre les orateurs des diffĂ©rents quartiers de la Commune. Pour certains, câest par Batine que les premiers occupants ont dĂ©barquĂ© et pour dâautres, câest par Niaganane. Mais câest aux questions : Comment le village de Thionck-Essyl a Ă©tĂ© dĂ©couvert ? Par qui ? DâoĂč vient le nom Thionck-Essyl ? Que Cheikh Abba Badji (nĂ© en 1922), notable dans le quartier de Batine (Ouest de la ville) rĂ©pond sans hĂ©sitation que selon son pĂšre : un des migrants en provenance dâEssyl, venus pĂȘcher dans les eaux environnantes de lâactuelle Commune de Thionck-Essyl a alors dĂ©couvert « GAATHIONG » (une vaste riziĂšre peuplĂ©e de riz sauvage) sur la plaine cĂŽtiĂšre qui sâĂ©tend entre le dĂ©barcadĂšre de Bah et Balankine (sous-quartiers de Batine). La grande Ă©tendue de cette riziĂšre et la bonne qualitĂ© du sol lâon poussĂ© Ă informer et Ă convaincre ses compagnons sur la nĂ©cessitĂ© dâoccuper ce nouveau site.
Ce pionnier, dit-il sâappellerait Adiogane Diatta et sa femme, AssĂ©kol. Câest lui qui, aprĂšs avoir dĂ©barquĂ© avec ses pairs dĂ©cida dâaller faire un tour sur le site. Lorsquâil arriva dans cette grande Ă©tendue de riziĂšre sauvage, il trouva un petit cours dâeau limpide, puis sâaccroupit prĂšs de sa berge, prit de lâeau de ses deux mains et la goutta pour mesurer sa teneur en sel. Cette source indique que câest de cette maniĂšre que cet homme est parvenu Ă se rendre compte que cette eau trouvĂ©e sur place Ă©tait douce, de bonne qualitĂ© ; dâoĂč la nĂ©cessitĂ© dây cultiver.
Ensuite, aprĂšs cette expĂ©rience qui lâa permis dâapprĂ©cier la nature de lâeau, il retourna en informer ses compagnons pour quâils viennent sâinstaller et cultiver cette riziĂšre. Câest ainsi quâils dĂ©cidĂšrent de venir occuper le site pour le cultiver.
Le nom « Athiong » dĂ©signerait cette vaste Ă©tendue de riziĂšre dĂ©couverte Ă Batine par nos ancĂȘtres en provenance dâEssyl dans le royaume de Bandial. Dâailleurs, câest la raison pour laquelle certains considĂšrent le dĂ©barcadĂšre de Balankine comme Ă©tant le plus ancien de Thionck-Essyl. Selon ce notable, le nom « Thionck-Essyl » proviendrait des termes suivants :
« Athiong » qui dĂ©signe cette grande riziĂšre et « Essyl », cette entitĂ© du royaume de Bandial dâoĂč sont originaires les ancĂȘtres des habitants de lâactuelle Commune de Thionck-Essyl.
DâaprĂšs ce notable, si jusquâ Ă une Ă©poque plus ou moins rĂ©cente (certains parlent de 1950), les ancĂȘtres de Thionck-Essyl sacrifiaient Ă la tradition en se rendant chez « Ayi » Ă Essyl Bandial pour faire des offrandes afin quâil pleuve, câest parce quâen raison du fait que les origines des ancĂȘtres de lâactuelle Commune Thionck-Essyl sont liĂ©es Ă Bandial. Ce fut une tradition, prĂ©cise-t-il, oĂč quand il ne pleut pas tous les quartiers de Thionck-Essyl dĂ©lĂ©guaient des membres sous la houlette de Batine pour se rendre en pirogues, Ă lâapproche de lâhivernage auprĂšs du fĂ©tiche.
La recherche de nouvelles terres rizicoles, la pratique de la pĂȘche et la cueillette dâhuitres, mais aussi la recherche dâeau sont essentiellement les facteurs qui ont conduit Ă la fondation et au peuplement de lâactuelle Commune de Thionck-Essyl.
Une autre version aussi d’aprĂšs la tradition, les ancĂȘtres des actuels habitants de Thionck- Essyl seraient venus de « Bandial » dans le dĂ©partement de Ziguinchor, plus particuliĂšrement dans l’arrondissement de Niassia, du village de Essyl. Mais certaines traditions poussent plus loin l’origine du peuple essyliens. Pour eux, les essyliens sont originaire de « Bourofaye », localitĂ© qui se trouve au sud de la commune de Ziguinchor. Elles soutiennent que c’est de ce village que des populations ont migrĂ© dans le « Bandial » oĂč elles fondĂšrent le village de « Essyl ». De cette localitĂ©, d’autres populations migrent vers la rive gauche du fleuve Casamance, au nord de « Bandial » oĂč elles fondĂšrent le village d’Affiniam. Une partie des migrants continue l’aventure vers le nord oĂč ils crĂ©Ăšrent un autre village appelĂ© Thionck- Essyl qui signifie pour certains « s’accroupir pour cuisinier » ou « ou thiong nou sil » : thiong = s’accroupir et essyl = cuisinier. Pour d’autres, le nom de ce village signifie « A Thiong d’origine d’Essyl » ou « A Thiong hara Essyl » car pour eux le premier habitant s’appelle A Thiong.
MĂ©moire de maitrise de gĂ©ographie de Cheikh Sidy DiemĂ© sur lâeffort dâĂ©quipement dans la commune de Thionck-Essyl 2010-2011.
Ayi : Câest le roi en diola. Avant la colonisation qui consacre la chute de lâanimisme, religion traditionnelle des diolas, Ayi constituait lâinstitution politico-traditionnelle et sociale Ă Bandial et Ă Thionck-Essyl. Il Ă©tait trĂšs vĂ©nĂ©rĂ© par les populations.
DablĂ© : Selon Cheikh Abba Badji, notable dans le quartier de Batine ce site Ă©tait sacrĂ© et sâappellerait autrefois Yabone, une ancienne occupation de la famille DiĂ©dhiou. Le dernier Ă y quitter sâappellerait Atamoussou DiĂ©dhiou.
Boudialkayoum : Appellation essylienne qui signifie littĂ©ralement comme son nom lâindique la riziĂšre de Kayoum.
MĂ©moire de Master 2 de GĂ©ographie de Moustapha ManĂ© sur lâappui des ONG au dĂ©veloppement local en Basse Casamance : Etude du cas de la Commune de Thionck-Essyl.
Informations complémentaires : Lien Article Wikipedia sur Thionck-Essyl